... à la physique cosmique

En 1930, Dauvillier, qui suit de près l'actualité scientifique, décide qu'il est temps de se consacrer à la physique cosmique et à l'astrophysique, qui, selon lui, ont toujours été le but ultime de ses préoccupations. Une note dans ses carnets nous en donne la raison : "C'est peut-être la déception philosophique d'une éducation religieuse reçue durant l'enfance qui m'orienta de bonne heure vers les sciences, puis, plus tard, vers la physique cosmique."

La physique cosmique, selon Dauvillier, est une science de coordination et de synthèse, qui ne se confond ni avec l'astrophysique, ni avec la géophysique, mais qui les complète et établit des liens entre eux. Elle a pour objet l'étude des phénomènes qui établissent des relations entre les corps célestes. Ainsi, le magnétisme terrestre devient de la physique cosmique lorsqu'on étudie l'influence du Soleil sur le champ magnétique terrestre. Dauvillier englobe aussi la chimie et la minéralogie cosmique dans ce vocable, et l'origine de la vie sur Terre est l'un des chapitres de la physique cosmique qu'il aborde.

Il s'oriente tout d'abord vers l'étude des rayons cosmiques, des aurores boréales, du ciel nocturne et de la lumière zodiacale, tirant parti des compétences expérimentales et théoriques acquises dans la première partie de sa carrière. Il entreprend plusieurs missions dans les régions polaires. Les mesures recueillies par ses appareils, certains de sa conception, lui permettent de conclure que les phénomènes auroraux sont liées à l'activité solaire, mais que l'intensité des rayons cosmiques en est indépendante.

En 1935, il crée un laboratoire de physique cosmique à l'Observatoire de Meudon, où il fait construire un bâtiment aux murs épais pour s'affranchir des rayonnements parasites. L'enregistrement continu du rayonnement cosmique lui permet de déceler une légère variation de son intensité avec le cycle solaire de onze ans. Toutefois Dauvillier attribue à tort l'origine des rayons cosmiques au Soleil : on sait maintenant que leur flux sur Terre n'est que modulé par le vent solaire.

En parallèle, il met au point des enregistreurs photoélectriques pour l'observation du ciel nocturne et de la lumière zodiacale, qu'il met en fonctionnement pendant un an à l'Observatoire de Ksara au Liban.  Dauvillier attache une importance particulière à la lumière zodiacale, parce qu'elle joue un rôle essentiel dans sa théorie des effets électromagnétiques du Soleil sur Terre.

Au Pic du Midi, la puissance électrique disponible étant insuffisante pour ses expériences sur les rayons cosmiques, il poursuit l'étude du ciel nocturne avec des détecteurs de sa fabrication. Avec un capteur à cathode d'hydrure d'or et un autre au sulfure cuivreux, il parvient à mesurer le rayonnement ultraviolet du ciel nocturne, en particulier l'émission de l'ozone.

A partir des années 1950, Dauvillier abandonne le Pic du Midi et le domaine expérimental pour se consacrer à des études théoriques originales portant sur des sujets très divers de la physique cosmique : l'histoire du globe terrestre et la genèse des océans, le volcanisme, l'origine de la vie, la formation du système solaire. En l'absence de données fiables, ces travaux sont souvent spéculatifs et, de ce fait, controversés. Ces sujets alimentent son cours annuel au Collège de France et font l'objet de nombreuses monographies, en moyenne une par an.